Un grand merci à Thomas Gibon du Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST) et nos partenaires d’ELYS Conseil, experts en Analyse de Cycle de Vie, pour leur contribution à cet article !
L’Analyse du Cycle de Vie (ACV) est une méthode d’évaluation qui vise à répertorier et étudier les impacts environnementaux d’un produit (bien, service ou procédé) sur l’ensemble de son cycle de vie.
Comme son nom l’indique, l’ACV se fonde sur une approche “cycle de vie”. Autrement dit, toutes les étapes du cycle de vie sont prises en compte dans la quantification des impacts, de l’extraction des matières premières nécessaires à la fabrication du produit jusqu’à son élimination ou sa valorisation en fin de vie.
Depuis 1994, l’ACV est une méthode scientifiquement reconnue et normée. Ses bases méthodologiques et déontologiques sont fixées par la série des normes ISO 1404x, notamment l’ISO 14040 et l’ISO 14044.
Autre point essentiel : l’ACV se caractérise par une approche multi-critères. Contrairement au Bilan Carbone dédié aux gaz à effet de serre et à leur potentiel de réchauffement climatique, l’ACV vise à analyser l’ensemble des impacts environnementaux générés par le produit. Parmi ces impacts environnementaux, on peut citer : l’épuisement des ressources, la qualité d’eau, la qualité de l’air, l’impact sur les sols, sur la biodiversité, etc.
La méthode de l’analyse du cycle de vie est reconnue et utilisée par de nombreux acteurs académiques, institutionnels et privés. En effet, il s’agit à ce jour de la seule méthodologie d’évaluation environnementale à la fois normée, multicritères et multi-étapes applicable à tous les secteurs économiques.
L’ACV est utilisée à des fins de diagnostic pour obtenir une vision des impacts environnementaux associés à un produit. On peut utiliser ses résultats notamment dans le cadre d’une démarche d’écoconception, à des fins de communication environnementale ou d’affichage environnemental (écolabels).
Le principal atout de l’analyse du cycle de vie est qu’elle permet d’éviter les transferts d’impacts. On parle de transfert d’impact lorsque la diminution d’un impact sur une étape du cycle de vie d’un produit implique des effets négatifs sur un autre impact et/ou une autre étape du cycle de vie.
Réduire son impact à un endroit de son cycle de vie peut avoir des effets pervers ou des effets rebond : l'ACV permet de quantifier tous ces impacts !
Grâce à sa vision multi-critères et multi-étapes, l’ACV permet d’éviter ces transferts de pollution potentiels ce qui en fait une méthode de comparaison de solutions alternatives efficace et donc un outil prisé dans le cadre d’une démarche d’éco-conception.
L’analyse du cycle de vie se compose de quatre étapes à la fois distinctes et interdépendantes :
1. La définition des objectifs et du champ de l’étude
2. L’inventaire du cycle de vie (ICV)
3. L’évaluation des impacts et dommages potentiels
4. L’interprétation des résultats obtenus en fonction des objectifs
L’ACV et le Bilan Carbone se distinguent sur deux points principaux :
Le Bilan Carbone s'applique à l'échelle d'une entreprise, et ne regarde que les gaz à effets de serre. L'Analyse de Cycle de Vie est multi-critères, à l'échelle d'une produit ou d'un service.
Si leur méthodologie diffère sur certains points (voire tableau ci-après), l’ACV et le Bilan Carbone suivent grosso modo les mêmes étapes de réalisation :
Par ailleurs, les données collectées dans le cadre d’un Bilan Carbone certifié (scope 1, 2 et 3) sont généralement les mêmes que pour une ACV et peuvent donc être utilisées directement pour sa réalisation.
Dans certains cas, une ACV peut nécessiter des données additionnelles. Pour Frédéric Croison du cabinet ELYS Conseil, “des données additionnelles peuvent être nécessaires pour certains aspects environnementaux qui ne sont pas liés au changement climatique, par exemple des émissions directes dans l'air, les sols ou l'eau qui vont contribuer à l'eutrophisation”.
Si les deux méthodes poursuivent des objectifs communs, leur finalité n’est cependant pas la même.
“L’ACV permet de comparer les impacts environnementaux de différents produits ou services, différentes options d’un même produit/services), voire des territoires” comme l'explique Thomas Gibon du LIST.
Pour faire le choix le plus “eco-friendly”, on utilise à une unité de comparaison commune dite “unité fonctionnelle”. En se comparant à un scénario de référence, elle permet ainsi de valoriser les impacts évités.
Le Bilan Carbone permet quant à lui de mesurer l’empreinte carbone d’une organisation, sans visée comparative, mais avec l’objectif d’identifier les leviers de réduction prioritaires.
L’unité fonctionnelle est l'unité de mesure utilisée pour évaluer le service rendu par le produit. En effet, l’ACV vise le plus souvent à comparer les impacts de deux produits. Or pour que cette comparaison soit pertinente, il est indispensable de définir une unité de mesure commune. Par exemple :
> Pour une ampoule : “assurer une intensité lumineuse de 800 lumens pendant 1000 heures”
> Pour un stylo : “écrire sur une distance de 90 km”
Comment utiliser l'unité fonctionnelle pour comparer deux produits ?
Prenons 2 ampoules de même luminosité (800 lumens). Si l’ampoule A a une durée de vie de 500 heures, et l’ampoule B 1000 heures, alors il faudra deux cycles de vie de l’ampoule A pour satisfaire l'unité fonctionnelle "1000 heures d'éclairage à 800 lumens" et seulement une ampoule B.
Si l’ampoule A génère deux fois moins d'impacts sur l'environnement au long de son cycle de vie (production, utilisation, fin de vie), alors l’impact des 2 ampoules est équivalent
Au final, il ne s’agit donc pas de considérer que l'ACV ou le Bilan Carbone est “meilleur”, mais plutôt de s’interroger sur quel outil est le plus adapté à votre entreprise :
Les deux solutions peuvent également être utilisées de manière complémentaire. Le Bilan Carbone, plus rapide et plus simple à interpréter, permet dans un premier temps de “faire le point” sur ses émissions pour définir une trajectoire de réduction. L’ACV peut ensuite permettre d’aller plus loin notamment pour améliorer un produit en particulier et pour éviter les transferts d’impacts.
Bilan Carbone et Analyse de Cycle de Vie (ACV) restent deux outils complémentaires : chacun a sa place dans la stratégie de transition bas-carbone de votre entreprise !