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RE 2020, décret tertiaire : quels enjeux carbone pour le secteur de la construction ?

Temps de lecture : 9 minutes

En fixant un objectif de réduction de 28% de la consommation énergétique des bâtiments résidentiels et tertiaires à l’horizon 2030 par rapport à 2010, la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC) a rendu nécessaire la mise en place de nouvelles exigences pour le secteur du bâtiment.. C’est chose faite avec le décret du 23 juillet 2019 dit « tertiaire » et la plus récente réglementation environnementale 2020 (RE 2020), qui actent une évolution importante des règles applicables. On analyse pour vous les principaux enjeux carbone de ces deux nouvelles réglementations.

RE 2020, décret tertiaire : cap vers la neutralité carbone du bâtiment !

1. RE 2020 : diminuer l’empreinte carbone des bâtiments neufs

Cette réglementation constitue la concrétisation de l’expérimentation « Energie positive / réduction Carbone » (E+/C-) lancée en 2016 et visant à encourager la construction de bâtiments « exemplaires » à faible empreinte carbone et à énergie positive.

Destinée à remplacer l’actuelle réglementation thermique 2012 (RT 2012), elle fixe de nouvelles règles en matière de construction de bâtiments ou parties de bâtiments d’habitation, de bureaux ou d’enseignement primaire ou secondaire. Ces exigences entreront en vigueur selon l’échéancier ci-dessous :

Périmètre d'application de la RE 2020

Les bâtiments concernés devront respecter des résultats minimaux en termes de consommations d’énergie et d’impact carbone. Ainsi et pour la première fois sont définis des seuils réglementaires à ne pas dépasser, exprimés en CO2eq par m2 de construction et pour une période d’usage de 50 ans.

Notez-le : Les exigences augmenteront progressivement avec trois échéances respectivement en 2025, 2028 et 2031.

Trajectoire des émissions des bâtiments résidentiels tertiaires

Il n’est pas exagéré de dire que la RE 2020 constitue un chamboulement important des règles actuelles. En effet, l’idée est désormais d’évaluer l’empreinte carbone d’un bâtiment en se fondant sur tout son cycle de vie, de sa construction à sa démolition. Plus question donc, de ne prendre en compte que la performance énergétique liée à son utilisation. 

La RE 2020 soumettra également la construction de certains bâtiments tertiaires spécifiques, listés à l’article R172-10 du Code de la construction et de l’habitation, au respect de nouvelles exigences de performance énergétique. Ces exigences, dont l’élaboration débutera en 2022, devraient entrer en vigueur à compter de 2023.

Les maîtres d’ouvrage les plus ambitieux pourront prétendre à l’obtention d’un label d’Etat récompensant les bâtiments faisant « encore mieux » que ce qu’impose la réglementation. Un arrêté déterminant les conditions d’attribution sera signé au plus tard fin 2022.

Avec la RE 2020, les acteurs de la construction vont devoir calculer l'empreinte carbone complète des bâtiments sur toute leur durée de vie, et aligner leur consommation d'énergie avec les accords de Paris.

2. Le décret tertiaire : augmenter la performance énergétique des bâtiments existants

Autre texte impactant en matière de bâtiment, le décret tertiaire, qui fixe de nouvelles obligations en matière de performance énergétique pour les bâtiments existants. 

Le décret s’applique aux bâtiments existants ayant une surface dédiée aux activités tertiaires (cumulée ou sur plancher) supérieure à 1000 m2. Pour rappel, le secteur tertiaire correspond à tout ce qui ne relève pas du secteur primaire (exploitation des ressources naturelles) ou secondaire (transformation des matières premières), soit essentiellement des services. 

Pour les bâtiments concernés, le décret tertiaire impose :

  • soit une réduction des consommations d’énergie finale d’au moins 40% en 2030, 50% en 2040 et 60% en 2050, par rapport à une année de consommation de référence ne pouvant être antérieure à 2010 (méthode des objectifs “en valeur relative”) ;
  • soit l’atteinte d’un seuil de performance énergétique défini pour chaque typologie de bâtiment (méthode des objectifs “en valeur absolue”). 
Objectifs de réduction de consommation d'énergie finale du décret tertiaire

Les assujettis devront annuellement déclarer les données de consommation d’énergie de leurs bâtiments par type d’énergie et dans l’unité qui a présidé leur achat sur la plateforme OPERAT, avec une première période de déclaration fixée au 30 septembre 2022 pour les données de 2020 et 2021.

Notez-le: la FAQ consacrée au décret tertiaire précise que les postes de consommation qui doivent être pris en considération concernent :

  • les postes de consommation conventionnelle de la réglementation thermique : chauffage, refroidissement, éclairage, production d’eau chaude sanitaire et d’auxiliaires (pompes, ventilateurs) ;
  • les autres usages immobiliers: ascenseurs, escalators, sécurité incendie, sûreté, etc. ;
  • les usages spécifiques et de procédés liés à l’activité.
Avec le Décret Tertiaire, les gestionnaires de bâtiment vont devoir déclarer leurs consommation d'énergie, et les réduire de 40% en à peine 10 ans.

Quels enjeux carbone pour les entreprises concernées?

L’objectif de la RE 2020 et du décret tertiaire est bien de « traquer » les émissions de gaz à effet de serre du début à la fin de vie d’un bâtiment. En conséquence, tous les métiers de la chaîne de valeur du bâtiment se trouvent directement impactés.

Application de la RE 2020 et du Décret Tertiaire dans la chaîne de valeur de la construction
Source: Aktio

De l’étape de conception du bâtiment jusqu’à sa démolition, toutes les entreprises concernées doivent désormais porter une attention particulière à l’empreinte carbone de leur activité et disposer de données suffisantes afin de permettre au maître d’ouvrage de se tourner vers des matériaux et modes de construction moins émetteurs. 

On peut logiquement en déduire que des entreprises qui jusqu’à présent n’étaient pas nécessairement soumises à l’évaluation de leur impact carbone (en particulier, des entreprises de chantiers) devront désormais y porter une vigilance particulière, en procédant par exemple régulièrement à un bilan carbone de leur activité.

La base de données INIES, qui a vocation à rassembler les données environnementales et sanitaires de référence pour le secteur du bâtiment (FDES, PEP, DED), constituera de fait un outil essentiel pour la réalisation des analyses du cycle de vie des bâtiments.

Il reviendra au maître d’ouvrage d’établir, au plus tard à l’achèvement des travaux et à partir d’un logiciel approuvé, le récapitulatif d’étude énergétique et environnementale du bâtiment permettant de justifier de l’application des exigences de la RE 2020.

Par ailleurs, dans le cadre du respect des exigences du décret tertiaire, les gestionnaires (propriétaires, bailleurs) risquent une amende de 7500€ en cas d’absence de déclaration de leurs consommation sur la plateforme OPERAT. Ils seront également encouragés, au-delà de la mise en place d’actions de réduction de leur consommation énergétique, à suivre régulièrement leur empreinte carbone qui lui est très fortement liée.

Comment être en règle avec la RE 2020 et le décret tertiaire ?

La RE 2020 et le Décret tertiaire peuvent avoir des implications différentes selon votre activité. Nous avons résumé les principales actions à mettre en œuvre dans le tableau suivant :

Prises ensemble, la RE 2020 et le Décret Tertiaire couvrent l'ensemble des acteurs de la construction et de la gestion des bâtiments.

Article écrit par Clara Godin et l'équipe Aktio