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A l’instar d’un nombre croissant d’entreprises, les fonds d’investissement, et notamment les fonds de private equity sont engagés dans une stratégie bas-carbone pour leurs entités propres mais également et surtout pour les entreprises de leurs portefeuilles.
Olivier Nataf, Head of Sustainability & Impact au sein de Montefiore Investment, nous explique pourquoi il a mis en place des actions concrètes, et notamment la réalisation d’un Bilan Carbone :
“D'une certaine manière, on est tous conscients du réchauffement climatique. Souvent ce qui freine le démarrage des projets de transition bas-carbone, ce n'est pas le pourquoi on le fait, c'est plutôt pourquoi on ne le fait pas. Et je pense qu'il y a deux grandes raisons dans les fonds, et c'est le cas aussi dans certaines participations : c'est un manque de connaissances, et un manque de compréhension de l’intérêt et du sens de la démarche.”
Après un travail de sensibilisation et d’explication de l’intérêt de la démarche, les participations sont souvent embarquées dans une dynamique vertueuse, conscientes d’avoir un impact positif sur le monde.
Vient également pour les fonds un deuxième enjeu qui est plus intimement lié à leur business model. On parle notamment de marque employeur, de protection et/ou de création de valeur sur les enjeux climat, qui font aujourd’hui partie des principales préoccupations des fonds.
“La marque employeur n'est pas la seule raison [..]. Les citoyens ont des attentes croissantes envers les entreprises, tant dans leur position de consommateur que d’employé. Donc ça veut dire que celles qui sont les plus engagées vendront mieux demain, recruteront mieux, se financeront mieux.” nous précise Benjamin Rey, Associé de Trocadero Capital Partners.
Afin de mettre en pratique ces attentes croissantes, les fonds d’investissement suivent des cadres méthodologiques de référence tels que le Bilan Carbone, ou encore le SBTi (Science-based Targets Initiative), qu’ils appliquent à leur portefeuille.
“A partir du mois de juin 2022 on demande à toute nouvelle participation de faire un Bilan Carbone et d'avoir une stratégie climat, en plus d’un plan global de Sustainability.” précise Olivier Nataf.
“C'est plus facile quand les règles sont fixées à l'entrée, c'est à dire au moment où le fonds investit dans l'entreprise. On explique d’emblée que les entreprises dans lesquelles nous allons investir vont devoir prendre des objectifs de décarbonation qui seront en ligne avec l’Accord de Paris. Et cela est encadré dans le pacte d’actionnaires.” ajoute Benjamin Rey.
En réalisant leur Bilan Carbone, les fonds de private equity observent assez rapidement que les enjeux de réduction des émissions de gaz à effet de serre se situent en immense majorité au niveau de leur portefeuille (>99% de l’empreinte carbone). Pour Montefiore Investment, des objectifs sont alors définis :
“On a pour objectif de passer à 33% de nos entreprises qui réalisent un Bilan Carbone et ont défini une stratégie climat quantifiée en 2025. Et à 2030, 70% de nos sociétés devront avoir un Bilan Carbone et une stratégie climat. En 2035, ce sera 100%.” affirme Olivier Nataf.
“Notre ambition, c'est bien sûr d’accompagner les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre. Mais c'est aussi de mettre sur la voie toutes les autres entreprises qui sont moins émettrices, qui sont donc moins directement concernées, donc souvent moins conscientes du problème, moins outillées et qui ont besoin de plus d’accompagnement.” ajoute Benjamin Rey.
Face à ce besoin d'accompagnement, les équipes de Trocadero Capital ont fait appel à Aktio pour réaliser le Bilan Carbone ainsi que le plan d’actions de réduction des émissions de plusieurs de leurs participations.
“Les conseils d’Aktio ont été déterminants, notamment pour le calcul des actions de réduction des émissions, qui mettent l'entreprise sur la bonne trajectoire. Par exemple, pour une société de notre portefeuille, Aktio a calculé que pour respecter les objectifs donnés par les accords de Paris, l’entreprise devait mettre en place du covoiturage pour 30% des kilomètres parcourus en voiture par les collaborateurs à horizon 2030. Ce n’est pas si simple de le calculer et l’on peut avoir besoin d’être accompagné.” ajoute Benjamin Rey.
Pour atteindre leurs objectifs ambitieux, les fonds peuvent notamment s’appuyer sur le cadre méthodologique SBTi, qui leur donne des objectifs quantitatifs et des lignes directrices définies par des experts.
“Nous suivons une méthode d’engagement qui est préconisée dans la méthodologie SBTI et qui est, non pas de réduire le bilan carbone en valeur absolue pour le portefeuille du fonds, mais d'engager ses participations à un rythme soutenu pour arriver à minima en 2040 à avoir 100% de ses participations dans une démarche de réduction carbone alignée sur les accords de Paris.” confie Olivier Nataf.
Pour limiter la charge de travail administratif pour les PME, Trocadero Capital accompagne ses participations sur une procédure simplifiée :
“SBTi a créé une voie spécifique pour les PME, qui s'appelle SBTi PME, avec des modalités simplifiées de validation des objectifs, mais qui ont le mérite d'être économiques et plus simples, même si plus limités dans leur périmètre. Nous avons choisi d'associer cette trajectoire simplifiée à des objectifs plus ambitieux, notamment sur le scope 3, avec un comité Impact indépendant qui validera notre méthodologie et nos objectifs.” explique Benjamin Rey.
Comme nous l’avons évoqué, les entreprises financées par les fonds de private equity, et notamment leur management, sont parfois peu informées sur le sujet de la transition bas-carbone, et peu conscientes des enjeux stratégiques qu’elle implique.
"L'engagement des équipes, c'est le plus important. Il va probablement se faire de plus en plus naturellement, parce que la conscience sociétale croît de façon très rapide [...]. On a de plus en plus de dirigeants qui sont impliqués, volontaires et des équipes qui elles-mêmes, sont de plus en plus en soutien de ces projets-là. Néanmoins, Il y a encore une hétérogénéité très forte selon les entreprises.“ affirme Benjamin Rey.
Il ajoute :
“On déploie un dispositif pour accompagner ces entreprises-là dans leur décarbonation et les mettre sur la voie de la mobilisation des équipes. Même pour les entreprises qui ne sont pas les plus grandes émettrices, ce sont des sujets de performance sociétale bien sûr, mais de performance financière également, ou simplement de pérennité. A termes, les entreprises les moins engagées seront moins bien notées, et finiront par être exclues du paysage en réalité. En particulier les petites entreprises qui travaillent avec les grands donneurs d'ordre, et qui finiront par être exclues des panels fournisseurs. Elles sont déjà en partie exclues des appels d’offres publics quand elles n'ont pas des normes suffisantes d'engagement sociétal. Donc il y a des enjeux de pérennité très forts."
Côté entreprise, on sent bien que le sujet peut également être porté en interne, et faire l’objet de discussions avec les actionnaires. C’est le cas notamment pour Terideal, où Léa Lakhdar, cheffe de projets RSE, nous explique leur démarche : “nous avons décidé d’embarquer toutes nos parties prenantes, dont nos actionnaires. On leur a présenté les résultats du Bilan Carbone, et on leur a fait une Fresque du Climat, pour leur montrer que nos enjeux stratégiques portaient aussi sur ce sujet."
"On a maintenant besoin de l’appui des fonds, puisque l’on est en train de bâtir notre plan d’actions et d’affiner notre stratégie, et l’on sait déjà qu’on aura besoin d’investir dans du nouveau matériel, de construire des partenariats avec des entreprises innovantes, voire même de racheter des entreprises. Donc on a besoin que les fonds nous accompagnent sur le sujet.”
Grâce à ces retours d’expérience, on comprend assez vite que la mesure de l’empreinte carbone et la définition d’une trajectoire carbone deviennent une préoccupation importante pour les fonds d’investissement. Cette tendance devrait se renforcer dans les années à venir, et de plus en plus de fonds sont appelés à engager ces démarches plus vertueuses.
Du côté des entreprises, il est important de noter que ces démarches, et notamment la réalisation d'un Bilan Carbone, sont de plus en plus demandées par les directions des grands groupes qui choisissent les fournisseurs qui s'alignent le plus avec leurs engagements.