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Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF/CBAM) : comment se conformer aux exigences ?

Depuis le 1er octobre 2023, le Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF) met en place une taxe carbone pour l’importation de certaines marchandises à forte intensité carbone produites hors d’Europe. Cette réglementation permet d’éviter la délocalisation de la production de ces marchandises dans des pays où la tarification carbone est plus faible qu’en Europe, voire inexistante. Dans cet article, nous vous éclairons sur les produits concernés par le MACF, les attendus réglementaires, les différentes échéances de mise aux normes ainsi que les diverses sanctions en cas de non-respect du règlement !

Temps de lecture : 8 minutes

Définition et enjeux

Un outil du paquet européen “Fit for 55”

Entré en vigueur le 1er octobre 2023 dans sa phase transitoire, le Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF) est un nouvel instrument réglementaire européen qui impose une tarification carbone sur certains produits importés fabriqués par des entreprises hors d’Europe.

🔎 Focus

Le MACF s’inscrit dans le cadre du paquet “Fit for 55” (“Ajustement à l’objectif 55”) du Pacte Vert pour l'Europe, pour l’Europe qui ambitionne une réduction de 55% des émissions en Europe d’ici 2030 par rapport à 1990.
Il est également connu sous l’acronyme anglais CBAM (Carbon Border Adjustment Mechanism), ou plus communément de "taxe carbone européenne".

Le principal objectif affiché du MACF est d’éviter la délocalisation de la production de certaines marchandises à forte intensité carbone dans des pays hors de l’UE où la tarification carbone est plus faible qu’en Europe voire inexistante (on parle de “fuites de carbone”). Plus généralement, il ambitionne de mettre “sur un pied d’égalité” les producteurs européens et étrangers afin d’inciter ces derniers à adopter des modes de production moins émissifs.

Concrètement, les importateurs de certaines marchandises de pays hors UE devront acheter des certificats MACF dont le prix sera indexé sur celui du CO2 au sein du marché du carbone européen ( SEQE-UE : Systèmes d'Échange de Quotas d'Émissions ). Chaque année, les importateurs devront déclarer la marchandise importée au cours de l’année précédente, et justifier l’achat des certificats MACF correspondants.

À terme, le MACF a vocation à se substituer aux allocations de quotas gratuits du SEQE-UE qui visent déjà à dissuader les délocalisations dans des pays aux normes environnementales plus “souples”.

Pour rappel, le SEQE-UE impose chaque année un plafond d’émissions dégressif aux sites industriels à forte intensité carbone. En cas de dépassement des plafonds, les industriels doivent acheter des quotas supplémentaires sur le marché du carbone.

Graphique du plafond des quotas dégressifs du SEQE

MACF : quels sont les produits concernés ?

Les produits concernés par le MACF sont listés en annexe I du règlement “MACF” (règlement (UE) 2023/956 du 10 mai 2023). Ces produits, identifiés par leur code de nomenclature douanière, relèvent (pour l’instant) de six secteurs d’activités, priorisés en raison de leur risque élevé de “fuites de carbone” :  

Notez-le

Le MACF s’applique également à certains produits de l’aval “proche” (contenant près de 100% de fer et d’acier et/ou d’aluminium) et certains produits dits “précurseurs” (matières premières servant à fabriquer les produits couverts).

Il est important de noter que l’identification des importations concernées par le MACF se fait sur la base des codes de nomenclatures douanières (codes NC) et non des secteurs d’activité. Autrement dit, une entreprise souhaitant savoir si elle est concernée par le MACF doit consulter les codes douaniers des marchandises qu’elle importe afin de vérifier s’ils relèvent ou non des produits listés en annexe I du règlement “MACF”.

Produits concernés par le MACF

Source

Notez-le

Ce champ d’application n’est pas définitif et a vocation à être élargi à d’autres secteurs d’activité / produits. Un rapport sur l’extension à d’autres secteurs d’activité devrait être produit d’ici la fin de l’année 2025 et la révision des produits couverts devrait intervenir à compter de 2026.

Une exemption s’applique cependant aux envois pour lesquels la valeur totale des produits MACF ne dépasse pas 150 euros. Autrement dit, les importateurs de très petites quantités de produits MACF peuvent être exemptés du règlement “MACF” à condition que cette exonération de minimis leur soit applicable.

Exemple :  un envoi de marchandises comporte :

  • 10 produits non MACF, chacun d’une valeur nominale de 20 euros
  • un colis de ciment identifié par son code NC (2523 21 00) dont la valeur n’excède pas 150 euros.

L’exonération s’applique alors uniquement pour le ciment.

Par ailleurs, le MACF exclut également de son champ d’application les marchandises originaires des pays suivants : 

  • Islande
  • Liechtenstein
  • Norvège
  • Suisse

MACF : quel calendrier de mise en œuvre ?

Afin de laisser le temps nécessaire aux importateurs de s’adapter aux nouvelles exigences, la mise en place du MACF se divise en deux phases distinctes :

Chronologie de la mise en place du MACF

Notez-le

La transition complète vers le MACF (induisant la fin de l’allocation de quotas gratuits) est prévue pour 2034. Jusqu’à cette date, les importateurs ne devront acheter des certificats MACF que pour la part des émissions qui ne bénéficient pas de quotas gratuits SEQE-UE. L’objectif est de ne pas pénaliser les importateurs par rapport aux producteurs de l’Union Européenne.

Graphique de la baisse programmée des quotas gratuits pour les secteurs couverts par le MACF
Source : Ministère de la Transition Écologique et de la Cohésion des territoires

Concrètement, quels sont les attendus réglementaires pour les entreprises ?

Durant la période transitoire (jusqu’à fin 2025)

L’objectif de cette première période, que la Commission européenne qualifie “d’apprentissage”, est de permettre aux importateurs concernés par le MACF de se familiariser avec leurs nouvelles obligations déclaratives. 

Ainsi, jusqu’à janvier 2026, les entreprises assujetties sont uniquement tenues de réaliser un reporting trimestriel de leurs émissions importées via le registre MACF (ou plateforme MACF). Cette déclaration doit notamment inclure les données suivantes :  

  • des informations précises sur les marchandises MACF importées (code NC, pays d’origine, importateur, quantité importée, etc.)
  • les émissions associées à ces marchandises (émissions directes et indirectes, émissions totales)
  • la méthode de calcul des émissions utilisée
  • le prix du carbone déjà payé dans le pays d’origine le cas échéant
  • diverses informations complémentaires en fonction du produit importé...

Notez-le

  • La liste des informations détaillées devant figurer dans les rapports MACF figure en annexe I du règlement d’exécution 2023/1793 du 17 août 2023.

  • Pour obtenir les données nécessaires auprès de leurs fournisseurs, les importateurs peuvent utiliser le tableur Excel mis à disposition par la Commission Européenne.

  • Durant cette première phase d’apprentissage, l’utilisation de valeurs par défaut pour le calcul des émissions importées est possible pour les importateurs n’ayant pas encore pu obtenir les informations nécessaires auprès de leurs fournisseurs. 

    Notons aussi qu’en prévision des obligations qui s’appliqueront à compter du 1er janvier 2026, les entreprises concernées doivent faire une demande de statut de “déclarant MACF autorisé” via la plateforme MACF à compter du 1er janvier 2025.

    Durant la période de fonctionnement effectif (à compter du 1er janvier 2026)

    À compter du 1er janvier 2026, les importateurs devront disposer du statut de “déclarant MACF autorisé” et acheter des certificats MACF pour pouvoir importer des marchandises couvertes par le MACF.

    ⚠️ Attention

    Une simple demande de statut en cours d’instruction ne sera pas suffisante pour pouvoir importer des produits MACF.

    Le rapport trimestriel sera remplacé par une déclaration MACF annuelle sur les émissions importées. La première déclaration annuelle, portant sur les émissions importées au cours de l’année 2026, devra être déposée avant le 31 mai 2027 (puis avant chaque 31 mai les années suivantes). Elle devra faire l’objet d’un audit obligatoire par un vérificateur accrédité.

    Le calcul des émissions devra se faire conformément à la méthodologie de l’Union Européenne et l’utilisation des valeurs par défaut ne sera plus possible sauf exceptions. 

    Enfin, le paiement d’une redevance sur les émissions importées par le biais de l’achat de certificats MACF sera progressivement introduit, parallèlement à la suppression progressive des quotas gratuits dans le SEQE-UE pour les secteurs concernés.

    Notez-le

    Le prix des certificats MACF sera fixé en fonction du prix moyen hebdomadaire des quotas du SEQE-UE vendus aux enchères (euros/tonne de CO2 émise).

    La “to-do list” de l’importateur de produits MACF

    1. Se connecter au registre MACF (guichet unique pour toutes les procédures MACF)
    2. Établir le rapport MACF trimestriel sur les émissions importées grâce aux données récupérées auprès du fournisseur ou des valeurs par défaut
    3. Collecter les pièces justificatives et déposer une candidature “déclarant MACF” au premier trimestre 2025
    4. Répondre aux éventuelles demandes d’informations complémentaires courant 2025 pour garantir l’obtention de l’autorisation avant 2026
    5. Acheter suffisamment de certificats MACF afin de détenir un stock minimum avant le 31/03/2026
    6. Déposer sa déclaration MACF annuelle vérifiée, les éventuelles demandes de remboursement et restitution des certificats avant le 31/05/2027

    Quelles sanctions ?

    En période transitoire

    Durant la période transitoire, la Commission Européenne a mis en place des sanctions proportionnées et progressives :  

    1. une invitation à compléter ou corriger le rapport en cas de rapport trimestriel incomplet ou erroné 
    2. une mise en demeure en l’absence d’un rapport ou si aucun effort de correction n’est apporté
    3. l’application de pénalités financières en cas de manquements répétés (10-50 euros/tonne de CO2)
    4. une inéligibilité possible au statut de “déclarant MACF autorisé” en cas d’infractions répétées

    En période de fonctionnement effectif

    À compter de janvier 2026, des sanctions plus sévères seront possibles pour trois types de manquements :

     

    Type de manquements

     

      Sanctions

     

    Importation de marchandises MACF sans le statut de “déclarant MACF” autorisé

     

    • blocage des marchandises lors du contrôle en douane
    • pénalités financières sur la base du volume d’émissions importées

     

    Fausse déclaration en douane

     

    • pénalités douanières
    • possibilité de retirer le statut de “déclarant MACF autorisé”

     

    Écart entre le nombre de certificats MACF restitués et la quantité réellement due

     

    • pénalité financière sur la base de l’écart
    • obligation de restituer les certificats MACF
    • possibilité de retirer le statut de “déclarant MACF autorisé”

     

    MACF : comment calculer le contenu carbone du produit importé ?

    Pendant la phase transitoire, les émissions peuvent être calculées par le biais de plusieurs méthodes : 

    • la méthodologie de l’UE, applicable dans le cadre du SEQE-UE (seule méthode acceptée à compter du 1er janvier 2025)  
    • une méthodologie équivalente
    • une méthodologie basée sur des valeurs par défaut

    “Méthode UE” ou équivalente

    La méthodologie proposée par l’UE est définie en annexe IV du règlement “MACF”. Elle se base sur la formule de calcul suivante :

    Émissions intrinsèques = émissions directes + émissions indirectes (+ émissions intrinsèques des précurseurs)

    Les émissions considérées dans le calcul sont donc à la fois : 

    • les émissions résultant du processus de production lui-même (émissions directes)
    • les émissions liées à la consommation d’électricité lors du processus de production (émissions indirectes)

    Par ailleurs, pour les produits semi-finis ou finis (dits “marchandises complexes” dans le règlement “MACF”), le contenu carbone doit également inclure les émissions liées à la production des matières consommées au cours du processus de production (appelées produits “précurseurs”).

    Notez-le

    L’annexe II du règlement d’exécution 2023/1773 du 17 août 2023 précise, pour chaque produit visé par le MACF, les informations clés à considérer pour calculer son contenu carbone, notamment les différents types de processus de production et les différents précurseurs à considérer dans le calcul.

    En pratique, il n’est pas attendu de l’importateur de connaître précisément la méthodologie de calcul des émissions de la marchandise importée. En effet, ce calcul nécessite une compréhension fine des procédés de production et doit donc être réalisé directement par l’opérateur de l’installation industrielle produisant la marchandise. Ce dernier doit ensuite fournir les données à l’importateur pour qu’il puisse les communiquer dans le cadre de sa déclaration MACF.

    Jusqu’au 1er janvier 2025, les opérateurs économiques peuvent également choisir d’utiliser une méthodologie équivalente à la méthodologie officielle préconisée par l’UE pour le calcul des émissions.

    Utilisation de valeurs par défaut

    Pour les entreprises qui n’ont pas encore pu récupérer les données des émissions réelles auprès de leurs fournisseurs, le recours à des valeurs par défaut est possible durant la période transitoire. Ces valeurs par défaut ont été publiées par la Commission Européenne le 22 décembre 2023. Elles ne s’appliquent pas au secteur de l’électricité.

    Notez-le

    Vous pouvez retrouver les valeurs par défaut applicables à chaque produit MACF (nomenclature douanière NC) dans ce tableur Excel mis à disposition par la Commission Européenne.

    Ces valeurs par défaut ne pourront cependant plus être utilisées à compter de la déclaration du troisième trimestre 2024, sauf pour les marchandises complexes et dans une limite quantitative de 20% du contenu carbone calculé.

    MACF : quel lien avec le Bilan Carbone ?

    L’instauration de cette nouvelle taxe carbone sur les importations illustre plus globalement une volonté de l’Union Européenne d’élargir le champ d’application du reporting carbone en l’imposant également aux producteurs qui exportent vers le marché européen. Par le biais de ce nouveau mécanisme, l’Europe espère notamment inciter les pays exportant en Union Européenne à mettre en place une taxe carbone sur leur territoire, à l’instar du SEQE européen. 

    En pratique, les producteurs de marchandises concernées par le MACF et exportant les produits en Union Européenne seront véritablement tenus de réaliser un Bilan Carbone de leurs produits à la fois sur les émissions directes (Scope 1) et indirectes (Scope 2). Il s’agit donc d’une avancée majeure en faveur de la généralisation de la comptabilité carbone au-delà du seul périmètre de l’Union Européenne.

    Documents utiles

  • Q&A de l'UE sur le MACF
  • FAQ DGEC sur le MACF(dernière MÀJ le 22/12/2023)
  • Guide pratique pour les importateurs, 23 avril 2024