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Nous remercions vivement Sebastien Samuel, co-fondateur de L1 Earth, cabinet de conseil spécialisé en transformation environnementale, pour sa contribution à cet article et ses éclairages sur le sujet.
Le réemploi consiste à donner une seconde vie à un objet ou matériau en le réutilisant pour un usage identique à celui pour lequel il a été produit.
En matière de consommation durable, le réemploi et la réutilisation sont souvent considérés comme une seule et même pratique. En effet, ils offrent globalement les mêmes avantages notamment sur le plan environnemental. Néanmoins, la réglementation opère une distinction entre ces deux concepts :
La réutilisation nécessite une étape préalable de “préparation en vue de la réutilisation”. Il s’agit généralement d’une opération de contrôle, de nettoyage ou réparation permettant la réutilisation du déchet sans pré-traitement.
Exemple : dans le secteur du textile, utilisation de rideaux usagés pour en faire des vêtements.
Enfin, le recyclage est un mode de traitement des déchets consistant à les transformer en matières premières et/ou en produits neufs. Contrairement au réemploi et à la réutilisation, il s’agit donc d’un processus industriel par lequel la matière première composant le déchet est récupérée, fondue (pour certains types de matière) puis réutilisée.
Exemple : fabrication de vêtements polaires à partir de bouteilles en plastique recyclées.
À l’heure où il est essentiel de modifier nos modes de consommation pour les rendre plus durables, le réemploi offre de nombreux avantages et notamment sur le plan environnemental.
Pour rappel, en économie circulaire, le cycle de vie d’un produit désigne l’ensemble des étapes de la vie d’un produit, de sa fabrication jusqu’à son élimination ou sa revalorisation.
Chaque étape du cycle de vie génère des impacts environnementaux spécifiques, étudiés dans le cadre d’une Analyse du Cycle de Vie (ACV).
Le réemploi apparaît comme un outil particulièrement vertueux car il permet de limiter drastiquement les impacts liés à la fabrication, la distribution mais aussi la fin de vie d’un produit grâce à l’allongement de sa durée d’usage.
Les évolutions réglementaires récentes, notamment la loi “AGEC” de 2020, visent à favoriser l’économie circulaire. Ainsi, pour tous les producteurs de déchets, au premier rang desquels se trouvent évidemment les entreprises, la réduction des déchets à la source doit constituer la priorité absolue, notamment en favorisant le réemploi (article L541-1 C. env.).
Pour les déchets qui ne peuvent être évités, les entreprises doivent respecter la hiérarchie des modes de traitement en favorisant prioritairement la réutilisation, le recyclage, toute autre valorisation et, en dernier lieu, l’élimination.
De manière plus sectorielle, de nombreuses réglementations récentes visent à favoriser le réemploi et la réutilisation pour certains produits spécifiques :
Par ailleurs, les cahiers de charges des différentes filières de responsabilité élargie du producteur (REP) fixent généralement des objectifs à atteindre en termes de réemploi et de valorisation des produits concernés.
Exemple : le cahier des charges applicable à la filière REP textiles fixe un objectif de 15% de taux de réutilisation / réemploi à moins de 1500 km du lieu de collecte en 2027. De même, le cahier des charges de la filière REP des éléments d’ameublement fixe un objectif de 120 000 tonnes d’éléments d’ameublement réemployés ou réutilisés à l’horizon 2030.
Contrairement au recyclage, le réemploi ne nécessite aucune étape de transformation du produit ce qui en fait une opération particulièrement vertueuse d’un point de vue écologique. Ainsi, d’une manière générale, il est préférable de privilégier le réemploi au recyclage pour les produits en fin de vie qui le permettent.
Dans le tableau suivant, vous retrouverez les principaux avantages et inconvénients associés à ces deux pratiques.
Bien que le réemploi offre de nombreuses opportunités sur le plan économique et écologique, il reste à ce jour moins répandu que le recyclage pour de nombreux produits. Plusieurs éléments peuvent contribuer à expliquer cette difficulté à développer massivement le réemploi :
Exemples d’aides/subventions recyclage : mise en place d’un fonds de 370 millions d’euros sur la période 2021-2027 pour les filières des plastiques / matériaux composites / textiles / métaux et papiers cartons afin de favoriser le déploiement industriel de ces filières, appel à projet 2024 de l’ORMAT (Objectif Recyclage MATières), etc.
Concrètement, il existe de nombreuses manières d’allonger la durée de vie (ou bien lui donner plusieurs vies) d’un objet ou matériau utilisé. En voici quelques exemples :
Plusieurs actions institutionnelles nous apparaissent également importantes pour systématiser le recours au réemploi et permettre sa généralisation :
Exemples :
Voici quelques pratiques qui peuvent être mises en place pour favoriser le réemploi en entreprise :
Exemples de bonnes pratiques à diffuser :
> Auprès des collaborateurs : réutiliser les imprimés papiers, mettre en place un stand de troc/échange ou un système de location d’équipements du quotidien (comme le fait les Biens en Commun) mettre à disposition et utiliser de la vaisselle réutilisable, proposer le rachat du matériel informatique de l’entreprise en fin de vie, organiser des ateliers de démontage/remontage des produits de l’entreprise etc
> Auprès du service achats : achat de mobilier de seconde main (auprès de Selency ou Bluedigo), d’équipements reconditionnés, etc
Au-delà des bénéfices environnementaux, développer un modèle d’entreprise axé sur le réemploi peut permettre de réduire massivement les coûts liés aux achats de l’entreprise et à la gestion des déchets. C’est également l’occasion de mobiliser pleinement vos collaborateurs dans la transition bas-carbone en les sensibilisant aux enjeux d’une économie circulaire !